Interview ATTRACTION THEORY

« Je suis partisan d’un disque qui n’est pas fini
où l’on peut toujours dire quelque chose jusqu’au dernier moment où les gens se l’approprient ». Didier Chesneau


Interview réalisée par Hugues Chantepie

Genre : Métal, Rock et progressives
Label : MII Prod
Album : «Principia »

Line-up :
Constance Amelane / Lead vocal
Didier Chesneau / Guitars
Christophe Babin / Bass
John Macaluso / Drums

Tracklist :
01. The Eye
02. Attraction Theory
03. Silent Signs
04. To France
05. The Eye (A Reminiscent Light)
06. Attraction Theory (Alternative)

Pourquoi un tel mode/choix d’expression artistique, le Rock au sens large et plus précisément prog, rock et metal ?
Didier Chesneau : ça ne va pas être très original, mais c’est avant tout l’énergie du jeu et du public qui est souvent sans compromission. Moi, j’ai une culture rock à la base et en tant que musicien c’est clairement ce que je préfère faire.
Constance Amelane : le rock correspond tout à fait à la manière dont j’ai envie de m’exprimer sur scène, j’ai exploré d’autres univers musicaux, mais finalement j’y reviens toujours et comme je dis : « chassez le naturel et il revient au galop ». J’ai évolué plutôt dans un registre classique dans le passé, mais le rock est devenu une évidence pour pouvoir faire passer un message fort.

Alors 2017, pourquoi ce nouveau projet et parlez-moi de votre rencontre artistique ?
Didier Chesneau : on s’est rencontré par l’intermédiaire d’un ami commun, un artiste de chez Ibanez à l’époque, organisant des Happy Hour avec des artistes, des fabricants, etc. Constance est venue me voir – je suis réalisateur et j’ai mon propre studio – pour travailler sur un projet dans lequel elle devait chanter.
Constance Amelane : qui ne s’est pas fait d’ailleurs !
Didier Chesneau : elle ma rappelé quelques mois après pour enregistrer des voix pour un groupe britannique qui l’avait contactée pour un duo.
Constance Amelane : je devais faire l’enregistrement de mon côté, je me suis donc souvenue de Didier, nous avons travaillé ensemble sur ce morceau et la rencontre artistique s’est enclenchée à ce moment-là.
Didier Chesneau : par la suite, on a donc commencé dans un premier temps à écrire des titres sans but précis, Constance avait des projets perso et moi un album solo en préparation. J’avais envie de faire des choses avec différents interprètes et puis au fur et à mesure de notre collaboration j’ai trouvé cela de plus en plus cohérent. Donc pourquoi ne pas faire un groupe !
Constance Amelane : on s’est attiré mutuellement !
Didier Chesneau : dans sa voix il y avait plein de registres qui nous permettaient d’explorer de nombreux univers.
Constance Amelane : sans barrières, sans limites ! Faire juste de la musique avec plaisir.

Pourquoi juste un 4 titres et deux bonus avec les deux premiers morceaux

« The eye » et « Attraction Theory » en acoustique ?
Didier Chesneau : parce que lorsque l’on arrive avec un nouveau projet, il faut une présentation, une carte de visite. Paradoxalement, c’est une question qui revient souvent, mais pour moi c’est une évidence. Avant, on faisait des concerts, on enregistrait un single ou un EP et seulement par la suite venait l’album. Aujourd’hui, on consomme les albums comme des singles, les gens s’intéressent à un ou deux morceaux et c’est tout. Nous nous sommes donc dit : « plutôt qu’ils écoutent trois morceaux sur l’album, eh bien on va leur en proposer quatre ! »

A l’inverse, pour faire de la scène, ce n’est pas un peu compliqué ?
Didier Chesneau : oui, mais nous avons déjà les morceaux de l’album ! Pourquoi seulement quatre titres ? Eh bien venez nous voir en concert et vous pourrez en découvrir d’autres !
Constance Amelane : oui, quatre titres, c’est un peu soft pour la scène !
Didier Chesneau : c’est vrai que l’on a plein d’histoires drôles pour meubler, mais ce n’est pas le but !

Ces 4 titres restent un test ? Ou il y aura vraiment un album par la suite ?
Didier Chesneau : l’album va suivre l’année prochaine.

Pourquoi reprendre deux morceaux déjà présents en bonus et en acoustique ?
Didier Chesneau : là encore, dans l’idée de se servir de l’EP en carte de visite, une chanson peut avoir plusieurs reflets et nous ne voulions pas nous mettre dans un carcan musical. Il ne faut pas oublier que certains des titres sont nés en guitare/voix. Par exemple, avec la version d’« Attraction Theory » on est revenu à l’essentiel. Constance vient du chant classique, lyrique, de la BO de film (elle a fait le cours Florent)… et c’était le moyen d’éclairer les morceaux d’une autre manière. Attention, pour l’album attendez-vous à tout !

Finalement, tu as un peu tout géré sur le projet ?
Didier Chesneau : en ce qui concerne les bonus, pas complètement. J’ai un ami avec qui j’ai joué par le passé et il s’est occupé des arrangements sur les titres bonus. On a pris du recul et on s’est posé cette question : si on revenait à l’origine des titres tout en restant juste des témoins, à quoi ressembleraient les versions de base ? C’était intéressant d’avoir l’opinion, la vision et le recul d’un autre musicien. J’ai donc un peu lâché l’affaire sur ces deux morceaux-là ! On peut se laisser surprendre par une orientation différente. On reste à la base des morceaux, mais c’est toujours intéressant artistiquement de voir la réorientation de certains titres.

Alors justement, ça se passe comment au niveau de la création ?
Constance Amelane : alors, moi j’écris, mais pas l’intégralité des textes et c’était important pour moi car jusqu’à présent, je n’étais qu’interprète. Je voulais m’exprimer de manière plus aboutie en tant qu’artiste. Après on a eu des collaborations comme sur « Silent Signs », en fait on reste très ouvert artistiquement.
Didier Chesneau : ça s’est fait un peu de concert. Lorsque l’on a écrit les titres et fait le choix de créer un groupe, le but n’était pas de se créer une méthode. Lorsque l’on crée tous les deux, c’est plus des questions du genre : ça t’évoque quoi ? tu as envie de parler de quoi ?, etc. Dans l’album, il y aura des morceaux où c’est Constance qui m’a suggéré un thème : j’ai envie de parler de tel sujet, est-ce que ça te parle musicalement ? Comme le titre « Attraction Theory », du moment que l’on donnait un titre à l’EP, il fallait que ce soit représentatif de ce que l’on aimait, il fallait une chanson, un peu rock, un peu metal, du coup elle est riche d’influences, c’est un peu notre raisonnement et résume notre façon de travailler.

Et l’ambiance en studio ?
Constance Amelane : horrible !

Didier, c’est donc un dictateur dans le travail ?
Constance Amelane : un tortionnaire ! Et ce n’est pas qu’une légende ! Non, il est extrêmement perfectionniste et ça tombe plutôt bien car moi aussi.

Donc par rapport à son expérience, il t’a apporté quoi concrètement ?
Constance Amelane : par rapport à l’interprétation des morceaux, quelque chose qui a plus d’impact, de dynamisme. Comme je viens du classique, du sympho, même si je suis influencée par beaucoup de choses, il a développé en moi une manière de transmettre les choses avec plus d’impact, de spontanéité et qui représente beaucoup plus la femme que je suis aujourd’hui. Finalement ça m’a aidée à m’épanouir.

Pourquoi avoir repris « To France » de Mike Oldfield, tiré de l’album

« Discovery » en 1984 ?
Constance Amelane : je n’étais pas née !
Didier Chesneau : elle n’était pas née, elle ne veut donc pas en parler ! En fait c’est plutôt un clin d’œil, pour diverses raisons. En premier lieu, on avait joué ce titre au Paris Metal France Festival, Constance était venue chanter « To France » et les gens voulaient savoir s’il y avait moyen de trouver cette version. Et puis, il y a Mike Oldfield, cet artiste un peu inclassable, on ne sait pas trop s’il est un artiste de pop, il peut faire à la fois des titres complètement opaques, obscurs, des « Tubular Bells » où l’on se demande où ça commence et ou ça finit, etc. En même temps, avoir des chansons très populaires que tout le monde peut s’approprier comme « To France » ou « Moonlight Shadow ». Ensuite, et c’est important, le timbre de Constance car c’est une voix féminine. Pour finir, c’était marrant également, sur un nouveau projet d’un groupe français, d’avoir un clin d’œil. D’ailleurs, on est allé au Namm Show aux Etats-Unis, un salon américain, et l’on s’est aperçu paradoxalement que les groupes français sont plutôt bien accueillis.

Mais c’est un artiste qui te parle particulièrement ?
Didier Chesneau : je ne suis pas un méga connaisseur de toute la carrière de Mike Oldfield, j’aime le côté d’ouverture qu’ont eu certains artistes de cette période, comme Genesis qui a su mettre aux oreilles du grand public quelque chose de pas forcément facile d’accès au premier abord. J’aime bien me dire que Pink Floyd a pu avoir des tubes avec des morceaux alambiqués et permettre aux gens de ne pas s’enfermer dans un style.

Justement, vous ne vous sentez pas enfermé dans un style ?
Didier Chesneau : pour l’instant non.
Constance Amelane : pas de frontière, pas de limite.
Didier Chesneau : on s’est donné un cap et les retours sur l’EP, c’est plutôt : « on ne sait pas où vous placer. »
Constance Amelane : on n’aime pas forcément que l’on nous colle une étiquette.

Aujourd’hui vous vous sentez fermés musicalement, ou d’autres cultures musicales vous semblent-elles intéressantes à intégrer ?
Didier Chesneau : encore une fois, moi j’ai plus une culture de son, les instruments ou les horizons musicaux sont vastes. C’est plus un thème de titre, j’ai eu la chance d’enregistrer des choses extrêmement variées. En tant que réalisateur, parfois tu as des albums qui fonctionnent quel que soit le style. Dans le raï tu as une énergie comparable à un groupe de rock sur scène et tu te dis « pourquoi je me priverais de cela ? » Par exemple j’adore quand Plant et Page avaient réalisé « No Quarter » – sorti en novembre 1994 – où il y avait un mélange avec un orchestre marocain et des guitares électriques. Je viens vraiment de là, utiliser la musique pour voyager, et plus un son est « nouveau » pour un certain auditoire plus c’est intéressant, mais rien n’est jamais nouveau. Parfois certains artistes apportent des petites choses comme ça été le cas dans le metal sympho avec des chanteuses plutôt sopranes dans un univers metal, ou des gens comme Blackmore qui ont apporté quelque influence classique dans un univers où ça ne l’était pas. Chaque fois c’est plus un petit éclairage pour arriver à faire voyager à travers la musique. Donc non, il n’y a rien de fermé.

Constance, comment travailles-tu ta voix ?
Constance Amelane : jusque-là j’étais autodidacte, je me laissais porter par les musiques que j’écoutais, par les différentes personnes avec qui j’ai travaillé. C’est vrai, récemment j’ai fait une rencontre avec une rééducatrice vocale, Isa Bowman, qui m’a réappris les bonnes bases d’un chant maîtrisé, avec de la puissance. En dehors de ça, je travaille mon instrument régulièrement.

Vous avez des bons retours après certaines scènes avec les titres de l’EP et de l’album à venir ?
Didier Chesneau : pour l’instant on est agréablement surpris, vu la masse d’artistes en ce moment on se dit : « c’est bien que les gens s’intéressent à nous ! »
Constance Amelane : c’est extrêmement motivant pour la suite.

Les solos de guitare sont très présents et puissants dans la construction, très techniques…
Didier Chesneau : je ne peux pas vraiment être objectif !
Constance Amelane : tu ne peux pas renier ce que tu es ! Chassez le naturel, il revient au galop !

C’était un peu cela le sens de ma question !
Didier Chesneau : c’est vrai que lorsque l’on a commencé les titres, on est parti sur du guitare/voix, finalement plus chanson et par la suite on s’est dit : « ça manque d’électricité ! »
Constance Amelane : et moi je disais : « mets plus de gratte ! »
Didier Chesneau : c’est ça, Constance a poussé dans ce sens, ce n’était pas forcément dans le cahier des charges des débuts. Je n’étais pas forcément là-dedans et ils m’ont tous poussé à faire des solos.
Constance Amelane : les solos sont trop courts en fait !
Didier Chesneau : ceci dit, ils n’ont pas eu à pousser très fort pour que je me lance ! Et finalement tu reviens vite à ce qui paraît être ton naturel.

Vous recherchez à transmettre quel sentiment lorsque vous êtes sur scène ?
Didier Chesneau : c’est toujours un partage. C’est simple : que les gens passent un bon moment, qu’ils puissent s’évader d’un monde actuel qui n’est pas si simple actuellement. Et Constance est très relationnelle avec le public.
Constance Amelane : je dirais, c’est plus un état d’esprit, soyez rock’n’roll et pas que dans la musique, prenez la vie simplement en vous éclatant.

Vous êtes un groupe très calé sur scène ?
Didier Chesneau : ça dépend du contexte, mais ça peut partir en impro, si Constance va chercher le public, interagir avec lui sur des chorus ou des parties musicales. Après il y a le statut du groupe dans lequel on est actuellement, on n’est pas un groupe tête d’affiche, on ne peut pas se permettre de jouer des heures et de déborder du timing. Mais oui, le but est de se laisser des parties open en interaction musicale avec le public. Après, il faut rester dans le cadre où cela est rendu possible, comme dans les acoustiques où nous n’avons plus aucune rigidité de temps.

Le petit mot de la fin alors…
Didier Chesneau : on veut vraiment jouer les morceaux et les faire découvrir avant de sortir l’album. A l’ancienne !

Laisser un commentaire

Propulsé par WordPress.com.

Retour en haut ↑